"Une gare peu accueillante" de Jules Bourgoin

Publié le par Jules Bourgoin

Une Gare peu Accueillante

 

    

     Le train prit de l’allure et ne fut plus qu’une ombre fuyante piquée d’un œil flamboyant de cyclope. Après que le train eut disparu dans les ténèbres du tunnel, j’observais autour de moi. De gros piliers me cachaient une autre voie ferrée a l’opposée de celle du train que je venais de quitter. Je remarquais avec surprise que j’étais entièrement seul dans l’obscurité. Les murs bourrés de tags et le plafond crasseux donnaient l’impression d’être séquestré. Une masse sombre derrière une cabine téléphonique attira mon regard, je m’en approchais et j’étouffai vivement un cri de surprise : un cadavre était étendu. Un revolver dans sa ceinture, une mitraillette dans son dos, une tenue de soldat gilet pare-balles inclus m’appris que c’était un militaire. Avec répugnance, je reculais. Ah ! C’est quoi ?!? Je me retournai vivement pour savoir sur quoi j’avais buté et failli trébucher : un autre corps ! Et militaire aussi ! Le dégoût fit place à l’horreur : des corps jonchaient le sol ! Je courus aussitôt vers la sortie en aval en évitant les cadavres. En me précipitant vers la grande porte, je constatai avec terreur qu’un cadenas empêchait l’accès du dehors. Qu… qu… Quoi !?! Je venais de réaliser le danger de cette mésaventure. Pourquoi n’ai-je pas écouté mon compagnon du train ? Qu’est-ce qui se trame d’étrange ici ? Que vais-je devenir ?

 

     Horrifié, je m’assis contre le mur à côté du grand portail. Mon épouvante, heureusement, ne dura pas : un train ! J’entendais un train arriver sur l’autre voie ! Je suis sauvé ! J’approchais vers la piste et observai. Oui ! C’était bien un convoi ! Après que ses phares m’eurent ébloui, je remarquais avec étonnement que la rame bougeait. Elle ne se tanguait pas, non non. Elle se balançait violemment sur les côtés et les murs du tunnel l’empêchaient de basculer sur la voie ferrée. J’aperçus des vitres partant en éclat et même une porte s’arracha de ses gonds. Je pouvais même distinguer les étincelles de la porte plaquée contre la paroi. Je commençais à sentir le souffle d’air que le train provoquait.

 

     Avec crainte et affolement, je m’éloignai de la voie ferrée et alla me réfugier dans une cabine téléphonique. Merde, je craque ! C’est quoi ce marasme?!? Ah ! Je sursautai et évita la crise cardiaque de justesse : un dépouille se trouvait allongé dans la cabine. Je m’agenouillais dans une position inconfortable mais qui m’autorisait à apercevoir la prochaine scène et à être écarté du corps inerte. Mais, bon sang, dans quelle galère me suis-je engouffré ??? Est-ce que, sans m’en rendre compte, j’aurais été tué dans le train ? Donc, logiquement, ici, c’est l’enfer et le diable va débarquer dans quelques secondes ? Ah mais quelles horreurs ! Bon reprends-toi Jules, ce n’est qu’une bonne blague extrêmement bien préparée…

 

    J’entendis le crissement des freins de train… et… un curieux bruit montant du convoi… Mais qu’est-ce que c’est qu’ce canular ??? Le train est là, il arrive, il sort du tunnel ! Et… il s’arrête. Heureusement, j’étais caché et je n’aperçus pas dans le convoi des … créatures se combattant. Et je ne vis pas le sang éclaboussant les quelques vitres qui n’étaient pas déjà cassée, des membres humains – bras, mains, jambes, têtes – qui volaient de toute part et bien d’autres horreurs encore… En tout cas, les cris de souffrance, je les percevais. La bataille sanguinolente prit rage hors de la  rame et même un bras coupé arriva sur moi en cassant la glace de ma cabine. Tétanisé, j’observais la main du bras qui après être restée immobile, s’accrocha à mon pieds puis resserra son emprise. Je devins fou : je pris le fusil à pompe, chargé, du soldat, je me relevai et je commençai à canarder la main qui entama des contorsions à faire devenir pâle un clown. Heureusement, pas besoin de cours pour appuyer sur une gâchette. Je ne ressentis pas que mon pied était complètement pulvérisé. Surpris par les bruits des coups de feu, les créatures démoniaques se retournèrent dans ma direction. Maintenant que ces… choses se plaçaient devant moi, je constatai, non sans étonnement, que ces bêtes ressemblaient étrangement à des zombies. Mais je n’eus pas le temps d’approfondir le sujet que déjà les monstres courraient vers moi. Je ne réfléchis pas un quart de seconde. Je lançai mon couteau suisse lame-ouverte sur un monstre qui fusa tel un éclair. La lame aiguisée transperça l’œil puis s’enfonça dans l’orbite. Le zombie cria à faire déchirer les tympans et je me dépêchai de presser mes mains sur mes oreilles. Mais trop tard : du sang coulait de mon oreille droite. Je ne perdis pas plus de temps. J’arrachai une kalachnikov d’un soldat de la main droite, hurla pour m’encourager … et tira. La kalachnikov les ralentissaient et le fusil à pompe porté par ma main gauche les achevait en les projetant des mètres en arrière. Je secouai vivement d’une main pour recharger le fusil déjà vide. Je les retardai mais insuffisamment pour les arrêter définitivement. Dans ma fureur, je ne décelai pas que mes deux armes étaient maintenant épuisées. Ils affluaient de tous côtés et je ne pus les retenir. Avant de pousser mon dernier soupir, j’envisageai un instant que je n’aurai pas d’avenir et qu’il manquerait un grand-père à mes petits enfants. Je n’eu pas le temps de cogiter d’avantage car les zombies m’avaient déjà décapité et arraché le cœur.




De Jules Bourgoin
 

Publié dans Rédactions

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